Que les masques tombent - feat Apo & Hellin [phase 3]

Pas grand chose ne lui échappait tant elle était attentive à son être, à sa façon d’être, à ses réactions et actions autant qu’à ses mots. Elle aimait le voir rester près d’elle quand il pouvait gentiment la congédier et partir poursuivre ses affaires. Elle aimait tout autant qu’il la laisse le regarder et le scruter sans s’en offusquer, avec un doux sourire qui étirait parfois la commissure de ses lèvres. L’avait-elle entendu soupirer il y a un instant? Avait elle senti un frisson parcourir alors son dos?

Il était alors venu pour voir le spectacle, lui, l’être reclus en son temple qui venait très certainement pour profiter de cette occasion particulière qui ne s’était pas produite depuis… depuis quand au juste? Un anniversaire comme celui-ci, Céleste ne devait pas en avoir connu des masses et n’en connaîtrait peut être pas de similaire avant longtemps. Et Abygaëlle se disant ça n’imaginait pas à quel point elle visait juste. Le spectacle et la surprise seraient incroyable ce soir. Haut en couleur et en rebondissements. Oui les choses deviendraient amusantes, elle le croyait sur parole. Après tout un défilé de chars c’était vraiment chouette, elle avait même entendu parlé d’un spectacle pyrotechnique! Elle tiqua en fronçant légèrement les sourcils à ses mots.

“Ce n’est pas faute d’avoir voulu prévenir la flamme de ce Phare. Mais elle n’en fait qu’à sa tête. ”

Il est drôle de parler ainsi d’une fête d’anniversaire. Il semblait vouloir évoquer quelque chose de négatif et la rousse savait que ses paroles n’étaient pas des mots en l’air. Elle en avait la certitude autant qu’elle savait qu’elle manquait une informations importante là dedans. Mais étrangement elle ne pouvait avoir peur en cet instant auprès de lui.

Elle se laissa porter par sa voix, l’écoutant toujours attentivement et appréciant son timbre et sa façon de s’exprimer. Il semblait la suivre sur sa vision de l’encre sous l’épiderme. Ce qu’il rajouta était tout aussi intéressant et la jeune femme haussa un peu les sourcils en hochant de la tête pour marquer son intérêt et son accord. Toujours muette, absorbée par lui. Elle se rendit compte qu’elle n’avait pas prononcé un mot quand il lui tendit la main. Un peu surprise et heureuse à la fois de cette invitation guindée et assez personnelle selon elle. Elle avait pu lui sauter sur le dos, venir lui toucher le bras, lui attraper la manche mais lorsque le geste et le contact venait de lui elle se sentit tout à coup assez intimidée et… privilégiée? Il est étrange de le dire mais parmis cette foule gigantesque, elle, l’inconnu pourrait être à son bras. L’idée la fit sourire et finit de la convaincre de poser sa main dans la sienne pour le suivre et se laisser guider dans la danse le coeur serré de plaisir et les pieds marchant à son rythme pour l’accompagner à la grande place où le coeur du spectacle se tiendrait. Elle en profita pour lui répondre d’une voix douce, ses yeux se perdant au loin, admirant les rues joliment décorées.

“Je te suis alors… Et, il est vrai que certaines personnes, trop peu je pense, le font tout simplement pour être elle-même. Comme si poser ces dessins ou ces écrits sous la peau était une part d’eux qui leur manquait pour être enfin eux même, ou un peu plus complets je crois? ”

Elle appréciait de déambuler dans la ville à ses côtés, ayant oublié bien vite le début de la soirée, elle avait l’impression d’avoir la tête dans la brume de ses souvenirs oubliés qu’elle tentait tant bien que mal de retrouver. Impossible de saisir quelque chose de précis mais elle pouvait faire confiance en ses émotions et son intuition. Sa main et son contact avait un effet sur elle qui ne lui semblait pas inconnu, de la même façon que ses yeux, sa voix ou encore sa manière de bouger. Elle semblait être familière à tout cela en même temps qu’elle le découvrait. Leurs pas se faisant aussi nombreux que leurs mots, ils arrivèrent à destination. Abygaëlle se prit à penser qu’elle aurait aimé ne pas arriver si vite car plus rien ne lui donnait de raison de se tenir près de lui ainsi. Pour autant elle ne s’écarta pas et joua la naïve, absorbée par la vue qui oublie qu’elle lui a offert sa main pour cette marche seulement. Profitant encore un peu de lui jusqu’à ce qu’il décide par lui même de reprendre sa liberté.

Ils étaient arrivés juste à temps, les badauds n’étaient pas encore trop nombreux à se presser et ils purent se glisser dans un endroit parfait pour admirer le défilé. Ni trop près pour que ça ne soit anxiogène, ni trop loin pour ne rien voir. Juste dans un coin de la place un peu moins bondé qui leur permettait tout de même d’admirer les chars en train d’arriver au loin tout en lumières, paillettes et fumée. Elle leva enfin ses yeux vers lui pour lui sourire et lui lancer une évidence.

“Nous arrivons juste à temps. Merci de me tenir compagnie ce soir Apocryphe.”

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Le vrai spectacle avait commencé et Abygaëlle ne détourna son regard de lui qu’aux premiers cris de surprise. Elle le sentit la pousser derrière lui alors qu’elle tentait d’en voir plus, de comprendre. Elle s’était accrochée et collée à lui et à son bras, essayant de se tendre, d’en savoir plus, de comprendre ce qu’il se passait. Le chaos se répandait, les gens, il y a quelques minutes si rieurs, criaient et fuyaient pour leur vie. Abygaëlle avait du mal à réaliser, à comprendre et à se rendre compte que sa propre vie pouvait être menacée. Le Phare, ce monde si paisible, où tous étaient protégés des affres de la vie et du monde. Comment serait-il possible que le chaos et la douleur les atteigne?

Ses lèvres étaient ouvertes et son souffle coupé, elle ne trouvait aucun mot pour poser ses pensées et les milles questions qui lui venaient. Ses yeux étaient grands ouverts mais elle peinait à croire ce qu’elle voyait. Le feu, les cendres, les ombres et la destruction… tout cela fondait sur eux. Elle sentit ses doigts prendre une nouvelle fois sa main et ce contact la ramena sur terre. Ses yeux se portant sur lui pour se raccrocher à quelque chose qu’elle savait vrai. Ses mots résonnent dans son esprit.

Ses mots lui venaient distordus, filtrant entre les sifflements de ses oreilles. Elle en prenait l’essentiel sans le lâcher de ses yeux apeurés. Elle commença à parler, à babiller plutôt, répétant ce qui la perdait et s'accrochant à son nom comme à sa main.

“Apocryphe… Des Bannis? Mais… on ne peut pas… non… on ne peux… les laisser… Et les habitants…? Les éclats? On ne peut pas...”

La jeune femme n’était pas stupide, loin de là. Ses émotions parlaient pour elle tandis que son cerveau fonctionnait à mille à l’heure en arrière plan, détaillant les scènes atroces qui se jouaient sous ses yeux. Regardant le sang se répandre parfois, les corps tomber, piétiner ou fuir. Elle comprit bien vite que ce qui se jouait là était un retour de bâton, que seule Céleste et apparement, peut être? Apocryphe auraient pu prévoir, éviter? Elle savait que si elle voulait vivre elle devait se faire égoïste, le suivre en fermant les yeux sur la douleur et sur les autres. Qu’après tout les éclats avaient un veilleur chacun… Un veilleur… Pirouette? Où était-il?

Elle se fit brutalement couper dans ses questionnements par la main d’Apocryphe qui la poussa hors de la trajectoire des débris qui commençaient à tomber sur eux. Le chaos les rattrapait et il n’était plus temps de rester inactifs. Elle se remit à le fixer, des questions plein les yeux, cherchant des réponses sur son visage et sa mine placide, s'accrochant plus à sa main tant la peur lui tordait le ventre à présent. Elle se faisait traîner loin de là, ses jambes suivant alors que son esprit refusait de le faire. Son corps mu par un instinct de survie plus que ses réflexions.

“Apocryphe! Qui sont-ils? Pourquoi venir ainsi?”
“Pourquoi aujourd’hui? Pourquoi maintenant?”
“Mais qu’est ce qu’il se passe BORDEL!”

La peur commençait à lui enlever politesse et verrou, elle laissait aller toutes ses réflexions dans les airs plutôt que de les tourner dans son esprit, martelant Apocryphes de mots à chacun de leurs pas jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent, interrompus par une femme affublée d’une radio et d’un… micro… des plus… originaux? Celle-ci avait l’air de s’amuser au milieu de ce foutoir. Lorsque la banni passe son bras autour d’Apocryphe, la feu follet s’écarte quelque peu, quelques pas seulement pour lâcher sa main et les regarder interdite. Les deux sont loins d’être surpris ou affectés par cette attaque et ce chaos. On dirait qu’ils pourraient tailler le bout de gras sur cette place où les cris emplissent l’air. Elle n’avait prononcé mot devant cette femme dont elle ne connaissait rien et qu’elle pensait voir pour la première fois.

Son esprit en fond tournait encore à plein régime et nourrissait son mutisme. Trop occupée à attraper des bouts de mémoire qui lui claquaient au visage comme un étendard déchiré, battu par le vent. Cette voix elle la connaissait… elle en saisissait des bouts plus que des images.


Aussi vite partis qu'arrivés, ces mots ne lui laissaient qu’une certitude, celle d’avoir connu cette femme un jour. Elle fit une grimace devant les choix douteux et les goût musicaux de la semi-inconnue. Regardant ensuite le micro qu’elle lui tendait sans le prendre, ses yeux émeraudes allant et venant entre la main tendue et le visage de cette femme sortie d’un autre monde. L'apocalypse s'abat et elle choisit de faire un karaoké? Abygaëlle restait interdite à la proposition et secoua les mains avec un:

“Sans façon, merci! Je crois que ce n’est pas le moment… Et… Vous êtes? Je ne me souviens pas de votre nom d’ailleurs?”

Elle ne cherche pas plus à maintenir le contact ou rester cordiale, elle commence à scruter le ciel, inquiète d’être séparée de Pirouette et de ne pas savoir où son dragon est. Feu follet inquiète pour son Veilleur, le monde à l’envers. Ce dernier bien en train de roupiller à la maison s’était fait réveillé en sursaut par un Robert lui sautant sur le museau puis le dos venant le prévenir de l’attaque imminente alors que Méphénésine passait dans le coin guilleret de la fête à venir. Le dragon prit rapidement son envol par un velux ouvert dans le toit, grandissant un peu en taille pour mieux survoler la ville à la recherche de sa protégée. Totalisant bien six mètres d’envergure ils se jeta directement vers le stand qu’il trouva vide. Sans perdre son sang froid il fila immédiatement à la place centrale où le gros du spectacle et de l’attaque se déroulait. Elle devait forcément être là. Il fallait qu’elle soit là… Il s’en voulait déjà tellement de l’avoir laissé tombé. ‘Stupide… Reptile inutile! ... LA !!’. Il l’avait vu… au milieu de la cohue, au milieu de cette foutue place au centre de tous les dangers en plutôt bonne compagnie quand même. Il connaissait bien le Karma et le Temps. Lui ne les avait pas oublié. Le dragon plia les ailes et effectua un piqué droit sur Aby, voyant un être étrange à la tête de poulpe courir droit sur elle. Il avait oublié cette Sentinelle là et il ne voulait pas courir de risques. Il atterrit brutalement entre sa protégée et le poulpe brailleur en posture de défense, écrasant et fissurant les pavés sous ses pattes. Crocs découverts et évaluant rapidement la situation, se reculant pour coller son arrière train à Abygaëlle et remarquant la panique du bipède bizarre et pointant immédiatement la vraie menace perchée sur le puit.

La feu follet voit rapidement son veilleur pointer en piqué sur elle, elle soupire de soulagement à le voir les rejoindre. Ses yeux ne tardent pas à se poser sur une scène encore plus étrange. Une Sentinelle à tête de poulpe venant courir vers eux en criant à l’aide poursuivi par une nuée de… quoi donc? De bestioles ailées? Ils ne tardent pas à être tous coupés du monde, les alentours devenant sombres et opaques. Abygaëlle sans s’en rendre compte recule de quelques pas pour se coller de nouveau à Apocryphe et lui attraper la manche et le bras, terrifiée par cette attaque, coincée entre le flanc de son dragon et le corps du Karma. Elle était déjà effrayée par la nuée et la bannie mais quand elle vit la main de la Sentinelle devenir pierre, elle devint blanche comme un linge, comprenant qu’il leur fallait se protéger.

“Oh putain de bordel de merde… C’EST QUOI CA?!”

Elle scrutait les alentour en déglutissant. Elle se baissa pour attraper une pierre et la projeta le plus loin qu’elle put pour la voir disparaître dans les ombres sans revenir et sans savoir que cette pierre ne réapparaîtra jamais de l’autre côté. A peine le caillou jetée, la rousse secoua violemment les bras autour d’elle pour claquer les atrocités qui venaient s’en prendre à elle, reculant d’un pas puis de deux, les envoyant bouler plus loin avant que d’autres n’essayent de prendre la place. Aidée de Pirouette qui battait l’air de sa queue, réduisant de taille pour s’adapter aux bestioles volantes. ‘Bande… De… Petites… Saloperies!’ Battant des ailes pour les envoyer bouler et jouant de sa queue et de ses crocs pour les dégager, le dragon faisait son possible pour protéger Aby et un peu aussi les deux autres.

“Merde, merde, MERDE! On peut pas rester là... ”

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Voilà le Karma qui oeuvrait maintenant à la sauver, elle, cette humaine et lui son veilleur et aussi cette étrange nana qui ne semblait pas vouloir le lâcher, revenant à la charge encore. Abygaëlle laissa ses doigts serrer sa main au fur et à mesure des instructions sachant parfaitement qu’il lui faudrait sous peu les lâcher pour le laisser faire et elle de son côté tenter de se défendre de ces bestioles ignobles. Quant à Pirouette il l’écoutait d’une oreille sérieuse, laissant battre sa queue dans l’air pour dégommer encore les machins volants. Il était alerte, ses yeux allant de sa protégée, au Karma en passant par la bannie pour surveiller la place au complet. Aussitôt dit, il hocha la tête envoyant l’image d’un bouclier devant Hellin dans l’esprit du Karma suivit d’une seconde image plus vive représentant un plus gros bouclier encore devant sa protégée. Pas besoin de mots, l’image était assez clair et ses yeux aussi.

La folle était déjà partie avec sa panoplie complète tel une boule de Noël bien bruyante que le dragon se mit à suivre rapidement, galopant derrière elle et dégommant des bestioles mutantes volantes au passage sous ses pattes, de ses crocs ou encore de sa queue. Il suivait le Temps de près et parfois voletait pour aller la contourner et la protéger des mini-gargouilles qui cherchaient à la machouiller pendant qu’elle se donnait en spectacle.

Au même moment Abygaëlle laissa ses doigts aller hors de l’étreinte d’Apocryphe et vint se glisser dans son dos en jetant un oeil à la pauvre Sentinelle prostrée derrière eux, pleurnichant les yeux exorbités de peur. C’était la première fois qu’Aby le voyait mais rapidement son attention se porta de nouveau sur son protecteur d’encre qui commençait à tracer des symboles dans l’air de la nuit. Sa voix calme contrastait avec l’enfer alentour, les bestioles les laissant enfin tranquilles pour suivre la diversion. Elle vint l’écouter, secouée par ses premiers mots, elle posa ses mains et son front sur le dos d’Apocryphe. Plus il parlait et plus elle se sentait faible, elle ne voulait pas vraiment y croire.

L’ordre des choses? Mais ce n’est pas juste... Pourquoi? Ce n’est ni juste pour les Éclats, ni pour les Veilleurs, ni pour les Sentinelles, ni pour les Bannis, pour personne… Pourquoi le Phare qui désirait tant protéger ses habitant avait reproduit les mêmes erreurs que le monde d’où elle venait en jugeant des être trop ceci ou trop cela pour ce monde. Pourquoi encore bannir la diversité, pourquoi encore faire souffrir? A vouloir corriger la différence de ce monde ça n’a entraîné que de la souffrance et cela… pour tout le monde. Comment le Phare pouvait il créer des être pour les rejeter sous terre? Elle tremblait de colère, d’impuissance et de tristesse à l’idée qu’une telle chose puisse être inévitable, elle venait serrer ses mains en point sur le dos du Karma, serrant le tissus pendant qu’il continuait sa tirage qui lui lacérait les pensées et le coeur. Qu’est-ce qui les empêchait d’agir maintenant, là? Comme ils le faisaient pour sauver leurs vies, le faire pour d’autres? Elle trembla un peu plus fort lorsqu’il lui expliqua son implication dans tout cela. Il savait et il avait essayé de prévenir Céleste… plus d’une fois. Pourquoi ne pas avoir agit? Pourquoi avoir continué cette mascarade?


Elle se met à parler alors d’une voix tremblante, aussi faible que son corps et son esprit qui ne fait qu’enfiler les ‘pourquoi’ sans trouver de réponse satisfaisante. Le son est faible mais les mots sont assez forts pour que seul Apocryphe puisse les saisir.

“Pourquoi? Pourquoi les créer pour les faire souffrir? Pour faire souffrir tant de monde? Apocryphe… Pourquoi être neutre et rester ici nous aider? Tu aurais pu me laisser là bas sur cette place et partir sans te retourner. Pourquoi avoir voulu me sauver moi et pas tous les autres?”

Elle tremble un peu plus et s’écarte de lui, pour comprendre, pour le voir et voir son visage, regarder ce qui les entoure pour marquer ses yeux et son esprit de la douleur et du chaos en train de se dérouler. Pour comprendre. Elle passe du visage d'Apocryphe à ses symboles qu’il perfectionne de sa plume. Elle passe sur le duo de distraction voyant Pirouette hurlant sur la bannie à plein poumons et se battant férocement. Elle passe sur la sentinelle prostrée qui ne cesse de gémir et qui commence à attirer les bestioles. Elle ne peux pas rester bras ballants ainsi pendant que tous s’activent à les sauver. La feu follet attrape une planche de bois brisée au sol non loin et commence à tourner sur elle même décidée à défendre le poulpe et l’Encre. Une bestiole vole à toute vitesse décidée à les prendre à revers et là elle vise et frappe eeeeeet Home Run. Le truc ailé finit droit dans le nuage noir pour ne jamais en ressortir. Pas mal pour un premier coup! Concentrée et s’essuyant les yeux elle reste alerte pour scruter la moindre approche. La rousse enchaîne les coups, écrase et piétine décidée à ce que personne ne s’approche d’eux et ne s’approche de Lui. Karma ou pas elle ne veux pas qu’il soit fait de pierre.

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Abygaëlle n’attendait pas vraiment de réponses de sa part, en vérité elle avait posé ses réflexions majoritairement à voix haute, comme si crier l’injustice au monde pouvait le réparer. Elle a toujours fait ça et ça n’a jamais rien changé. Si… peut être que de le faire, cela avait allégé son coeur et son esprit. Mettre le doigt dessus pour y penser plus tard, pour se dire qu’elle avait le droit de passer à autre chose et de se battre pour sa vie, égoïstement, sans culpabiliser. Elle avait vu, surprise, l’encre l’entourer pour prendre forme en une combinaison étonnante, molletonnée et haute en couleurs. Une belle combinaison de maître chien qui pourrait la protéger de la majorité des attaques des bestioles volantes. Elle avait capté rapidement le regard d’Apocryphe lui offrant un sourire de remerciement qui n’atteignit jamais ses yeux trop chargés de tristesse.

Rapidement elle devint de nouveau alerte en claquant de sa planche une nouvelle bestiole. Elle avait comprit que les envoyer dans le nuage noir ne les ferait pas revenir alors elle visait du mieux qu’elle pouvait et parfois arborait une grimaces quand des cracs sonores se faisaient entendre aux os brisés des créatures contre la planche. Mais c’était eux ou elle à cet instant. Elle tournait sur elle même et se déplaçait autour du poulpe bipède et du Karma, faisant son possible pour les protéger en jetant un coup d’oeil à la femme excentrique et son veilleurs, eux deux aussi bien protégés par les soins du Karma. Pirouette avait fière allure tel un avion de chasse paré ainsi. Il était vraiment doué à se faufiler agile pour tuer de la gargouille. Il était la concentration et la colère incarnée. La voix d’Apocryphe la tira rapidement de sa contemplation en la complimentant.

“Merci et… merci pour les protection et … le style?! Quoi que… je ne suis pas certaine du bon goût de celle de l’orchestre ambulant là bas? Mais j’apprécie l’humour pour… hum… Le poulpe!”

Petit à petit elle retrouvait un sourire plus sincère, concentrée sur les vies qui lui étaient liées et oubliant l’ampleur de la situation en étant elle même coincée dans un foutu petit bordel. Et paf! Encore une bestiole qui apprenait à voler sans avoir à déployer ses ailes. Elle devenait douée dans son jeu de poignet la rousse. Et encore, les gargouilles-chauve-souris-cheloues volantes étaient vraiment en petit nombre vu le bon travail que faisaient les deux là bas, surtout avec la voix d’une Hellindel qui hurlait blagues salaces sur remarques douteuses. La feu folet, quoi qu’elle entende ne cessait d’avoir tout de même cette boule au ventre d’inquiétude pour tous… Quelle serait leur vie avec des bannis qui les maudissaient à ce point? Comment allaient-ils s’en sortir surtout? Apocryphe pris encore le temps de lui répondre, ses mots tombant, vérités qui faisaient mal car irrémédiables. Aby le savait mais elle espérait pouvoir encore un peu se voiler la face et s’accrocher à un peu d’espoir avant de ramasser les miettes de son coeur au sol. Elle hocha la tête en réponse.

“Oui, je vais faire mon possible Apocryphe. ”

Elle était alerte, courait et bougeait en tous sens, renvoyant les créatures dans le vortex de leur maîtresse, essoufflée de ses efforts quand elle entendit la longue tirage d’Hellindel lui répondant enfin. Ca, la feu follet avait cru le comprendre que c’était cette femme qui était en charge de lui annoncer la mauvaise nouvelle, mais la placer et la catégoriser comme Sentinelle du Temps faisait sens maintenant. Elle secouait la tête un peu dépitée de la prestation alcoolisée de la sentinelle digne d’un camping au beau milieu de la Creuse. Elle espérait juste que ça ne mettrait pas plus en danger Pirouette qui continuait à batailler contre les bestioles pour les protéger tous. Seulement, sa pause lui a coûté sa protection. A peine avait-elle arrêté de bouger que trois puis quatre et cinq bestioles étaient venues s’accrocher de leurs griffes sur sa combinaison, leurs dents acérées déchiquetant le rembourrage.

Apocryphe avait bien fait les choses car la peau de la rousse était sous bonne protection mais les bestioles pas tout à fait stupides avaient compris la même chose et se mettaient à grimper pour atteindre son visage à l’air libre. La feu follet gigotait et se mit à débiter tout un lot d’insultes plus ou moins colorées en essayant de décrocher les vermines, s’éloignant d’Apocryphe et se retrouvant au milieu de la place. Elle commençait à paniquer quand elle en sentit une lui grimper bien trop rapidement dans le dos. Pirouette de son côté, concentré à sa tâche n’en perdait pas moins sa protégée des yeux. Lorsqu’il la vit en mauvaise posture en train de se dandiner pour se libérer de la menace, ni une ni deux le dragon ne réfléchit pas et fonce droit sur elle pour l’aider. Il vient la percuter pour arracher les bestioles les plus près de son visage mais juste un peu trop tard car l’une d’elle avait quand même réussit à marquer sa mâchoire d’une belle morsure. La pierre commençant à se répandre doucement sur une petite zone allant du lobe de son oreille à son cou pour monter juste un peu sur sa joue.

La pierre s’étend sur la peau de la jeune femme comme la peur sur son cœur. Tout à coup les enjeux se font encore plus marqués et les conséquences plus funèbres. Elle se prit à hoqueter d’angoisse à l’idée de finir pétrifiée. Abygaëlle se relève aidée de son dragon et vient se replacer près d’Apocryphe plus concentrée que jamais à l’idée de dégommer les vermines qui s’approchent en espérant que quelqu’un ait un remède ou que la pierre soit temporaire.

Pirouette après avoir accompagné d’un oeil froid la feu follet dans son chemin pour se mettre sous bonne garde lâcha un long cri de rage fournit par quelques flammes. Il s'étonna quelques instants de cette nouveauté avant de reprendre son souffle longuement et de se camper sur ses pattes pour diriger le cri sur la masse volante grouillant entre Hellindel et Vampirella.

‘Que le barbecue commence….’

Il lâcha soudainement son souffle, vidant ses poumons dans un cri, rugissement faisant trembler les pavés et brûler l’air devant lui. Les flammes bleues, magnifiques bannières de sa colères, parcouraient l’espace qu’il visait, raz de marée inarrêtable et mortel pour les êtres qui étaient engloutis. Il repris son souffle et hurla une fois de plus mais cette fois les flammes se firent plus petites et les bestioles restantes moins apeurées. Tous avaient compris que le rechargement des flammes n’était pas instantané encore chez ce jeune dragon. Et ce qu'il restait de la nuée se fit plus grouillant pour l’atteindre et le neutraliser. Une solution s’offrait au Veilleur, porté par la colère, une belle solution sur son promontoire. Il déployait ses ailes et se lança immédiatement, flèche fondant sur sa proie. Tournoyant quelques instants pour déloger les moustiques insupportables et le dragon finit en piqué sur la bannie pour venir la percuter.

Son but n’était pas de la décapiter car il avait entendu Abygaëlle et Apocryphe parler. Il savait que cette femme n’était qu’une victime de plus d’un Phare trop perfectionniste. Il la plaquait de ses pattes après l'avoir projeté au sol grognant et vint arracher le médaillon de ses crocs en essayant de le pas égorger la femme sous lui. Une belle strie vint tout de même zébrer sa peau, mais le mal était moindre. Le dragon releva la tête pour prendre ses ordre du Karma quand il hoqueta et toussa. Il était comme un bon gros pataud en train de s’étouffer avec le médaillon dans la gorge et la chaîne accrochée à une de ses dents.

‘Euh... A l'aide?’

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Abygaëlle était retournée, secouée, près du Karma qui restait muré dans son silence. Cependant elle ne pouvait quitter son Veilleur des yeux, le voyant incarnation de la colère et se découvrant dragon de flammes. Elle était un peu perdue, une main sur sa joue et son cou pour sentir la pierre sous ses doigts et le nœud dans son ventre de constater que sa peau et ses sensations avaient disparu. Le dragon, en un battement d’ailes avait réussi à renverser la situation, animal épique se transformant en gros pataud s’étouffant, ce qui fit quelque peu retrouver son sourire à sa protégée, enfin. La mine déconfite de Pirouette qui se dirigeait doucement dans sa combinaison de compétition vers Apocryphe et Abygaëlle, fit doucement rire cette dernière qui se tenait encore un peu en retrait. Elle surveillait du coin de l’oeil la masse grouillante de créatures hybrides qui venait voleter autour de la bannie qui tentait de se relever, se protégeant de sa cape en râlant bruyamment et agitant les bras.

Pirouette crachat le pendentif en un beau ‘Pouuuuark’, rendant l’objet aux mains du Karma. Le dragon, libéré, surveilla les alentours et décida de rester maintenant avec sa protégée et de ne plus la lâcher. Il se dandina un peu et marcha jusqu’à elle pour se coller à ses côtés en frottant son flanc à elle puis venant amener sa grosse tête sur sa poitrine pour réclamer des caresses en la cajolant.

La Feu Follet entoura la bouille du lézard ailé d’un bras pour le câliner distraitement pendant qu’elle ne lâchait pas Apocryphe du regard. Elle l’avait vu nettoyer grossièrement le bijou sur sa combinaison avant de lui tendre sous le nez. Elle hésita un instant le regardant dans les yeux avant de venir saisir la chaîne et son pendentif dans le creux de sa main pour l’observer de plus près. Elle vit que le médaillon était simple, un ovale où une jolie chauve-souris endormie et pendue à l’envers était gravée finement. Celui-ci était muni d’un mécanisme qui permettait de l’ouvrir en deux, comme ce genre de pendentif qui peut contenir une photographie d’un être cher.

“Merci Apocryphe… J’essayerais d’en faire bon usage… si j’en fais usage un jour. Je crois que déchaîner ces bestioles me fait un peu peur maintenant. ”

Elle fit une petite grimace en voyant qu’effectivement il restait de la bave de Pirouette. Elle lâcha ce dernier qui était occupé à grogner de contentement sous ses grattouilles pour transférer le médaillon dans son autre main et essuyer la première sur sa combinaison dans un “Beurk… ça colle... ”. Elle adressa une grimace plus prononcée à l’attention d’Apocryphe qui était plutôt vaguement concentré sur la scène autour de lui, bruyante et désordonnée.

Abygaëlle prit une grande inspiration pour se donner du courage et se recula de quelques pas en enfilant le médaillon à son cou. Elle était assez écarté de son dragon et du Karma pour être sûre de ne pas leur causer de tort. Doucement sa main tremblante se porta au pendentif pour venir chercher le mécanisme et l’ouvrir en deux ce qui provoqua un moment surréaliste. La horde de créatures volantes se figèrent dans leur mouvements pour toutes se tourner vers la nouvelle détentrice du bijou. Et rapidement toutes les bestioles se mirent à voler droit sur elle, fondant à une vitesse incroyable. Si le médaillon ne faisait pas l’effet escompté, c’en était fini d’elle. La rousse ne pu s’empêcher de reculer d’un pas, hésitante et tremblante, regrettant son choix et son courage précédent. Elle répétait en boucle le même mot d’une petite voix.

“merde, merde, merde, merde, merde, merde, meeeeeeeerde…. ”

Et aussi rapidement que tout avait débuté, tout se termina. Les gargouilles volantes rétrécirent d’un coup pour se faire aspirer par le médaillon et disparaître de la vue de tous. Digne d’un piège des Ghostbusters, le bijou avait piégé les monstruosité pour les mettre hors d’atteinte jusqu’à ce que potentiellement, le médaillon s’ouvre de nouveau. En attendant, Aby l’avait claqué et fermé entre ses doigts et verrouillé le mécanisme dans un souffle vacillant, mêlé de peur et de soulagement. Elle laissa le bijou glisser sous ses vêtements pour le garder à l’abri. La rousse se retourna vers Apocryphe et Pirouette qui grognait mécontent de l’initiative de sa compagne. ‘Stupide! Stupide humaine… Non mais vraiment… Suicidaire hein? Ca va pas la tête?’ Ce dernier lui envoya une image assez claire à l’esprit: elle en statue, pétrifiée au milieu de cette place.

“Oui bon bah hein…. Voilà.... Au moins c’est fait et on est fixés...”

Elle vacilla quelques secondes, l’image encore à l’esprit et porta la main à son cou, la partie figée dans la pierre. Un léger soupire sorti de ses lèvres avant qu’elle n’adresse un sourire feint à Apocryphe, comme si de rien n’était en se rapprochant de lui, ignorant le brouhaha ambiant. Elle voulait se raccrocher à quelque chose et c’est à lui qu’elle le fit, glissant sa main dans la sienne, emmêlant leurs doigts comme plus tôt pour ne plus avoir peur.

“Et maintenant…?”

Deux mots qui cachaient un millier de questions. Elle se demandait comment ils allaient sortir de ce maelstrom de ténèbres. Comment serait le monde dehors, détruit ou intact? Si la vie pourrait continuer. Si un jour elle pourrait retrouver sa peau ou si son état allait empirer. Si elle pourrait rester à ses côtés. S’il allait décider de lâcher sa main et disparaître. Si le monde allait continuer de tourner. Et si elle comprendrait enfin pourquoi son cœur se serre lorsque leurs yeux se croisent.

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